C’est sous le ciel bleu de la Hongrie qu’un petit bébé blond vient au monde à l’aurore du 14 mai 1883. Enfant pourtant impatiemment attendu par Istvan et Ilona Grindelwald, cette naissance cause pourtant problème au vu des cheveux blonds comme les blés et les yeux vairons du nourrisson. S’il ressemble à sa mère, il n’a absolument rien qui se rapproche de son père et ce dernier a déjà d’excellents motifs de croire que ce petit garçon n’est pas le sien. La mère est aussitôt confrontée et c’est avec une certaine satisfaction que la jeune femme confirme les soupçons de son époux.
Ilona est en réalité la troisième femme d’Istvan Grindelwald: la première a été répudiée et retournée à sa famille parce qu’elle ne pouvait pas lui donner d’enfants et la seconde s’est suicidée en se jetant en bas d’une des tours du château. Istvan est un homme qui n’a que bien peu de qualités aux yeux de son épouse, sur laquelle il a une forte emprise de peur et de violence, bien qu’il soit un sorcier bien moins puissant qu’elle. Après quatre longues années d’un mariage qui n’avait amené que désespoir et une série de fausses couches à Ilona, elle avait fait la rencontre hasardeuse d’un Moldu, grand, blond, qui l’avait traitée avec respect et gentillesse dès leur première rencontre, tout le contraire d’Istvan il va sans dire. À cette époque, les sorciers avaient interdiction formelle de se mêler aux no-majs, encore moins de leur révéler l’existence de la magie. Mais pour une jeune femme de vingt ans comme Ilona qui dépérissait dans un mariage horrible, cet homme était une bouffée d’air frais, un refuge de tendresse et de réconfort. Mais Istvan était un homme possessif qui ne souffrait pas de passer en second, et qui n’était pas aveugle face aux escapades que multipliait sa jeune épouse hors du domaine. À mots à peine couverts, il avait fait comprendre ses soupçons à Ilona et avait laissé entrevoir une terrible vengeance, sur elle, sa famille, mais surtout sur l’élu de son coeur si cette relation ne prenait pas fin. Cette dernière avait fini par se résigner, livrer la mémoire de celui qu’elle aimait à l’Oubli, pour le protéger. Quelques mois après ce dernier adieu, elle avait constaté qu’elle était enceinte et il n’avait fait aucun doute dans son esprit que cet enfant n'était pas d’Istvan. La tristesse de la séparation était devenue une joie immense, et surtout une possibilité de se libérer de son mariage. Un bâtard, d’un père Moldu, et si en plus l’enfant ne développait aucune magie, c’était assuré qu’elle sera rejetée comme la première épouse d’Istvan. Ilona n’hésita pas à tout tenter pour s’assurer que son enfant ne développe aucun potentiel magique: sortilèges, potions et autres expériences à la moralité pouvant être jugée plus que douteuse. Face aux étranges yeux bicolores de l’enfant, elle a espoir que ses tentatives de soutirer toute magie à son enfant ont fonctionné. Encore une fois, Istvan n’est pas dupe, mais l’enfant est un garçon, Istvan ne rajeunit pas et si ce gamin venait à posséder un potentiel magique équivalent à celui de sa mère… Il faut faire perdurer le nom des Grindelwald après tout, et Istvan a déjà des projets en ce sens. L’enfant portera donc son nom. Le secret sur ses origines réelles ne sera connu que de ses parents.
L’enfant est choyé par sa mère pendant les premières années de sa vie; Ilona l’emmène partout avec fierté, jusqu’en Angleterre pour rendre visite à sa tante Bathilda. Il est la prunelle de ses yeux et elle veille sur lui comme une dragonne sur son petit… jusqu’au jour où tout bascula. Entrant dans la nurserie, la mère surprend son fils en train de jouer innocemment à empiler de jolis blocs de bois colorés les uns par-dessus les autres… en les faisant léviter. Les grands yeux émerveillés que tourne le petit vers elle se transforme rapidement en un cri de terreur étouffé. L’impensable se produit: Ilona tente d’assassiner cet enfant qui jusqu’alors avait été si précieux pour elle. Le petit ne s’en sort qu’in extremis, de quelle manière exactement, l’histoire reste nébuleuse et l’enfant est trop jeune pour en avoir des souvenirs précis.
À partir de cet incident, Gellert ne croise plus sa mère que de manière sporadique et passe sous la supervision de son père Istvan. Homme froid, contrôlant, brutal dans ses méthodes, violent dans ses colères, ce dernier confie l’héritier de la famille à des précepteurs afin de modeler ce jeune esprit et en faire un Grindelwald digne de ce nom. Les jeux d’enfant deviennent des livres et des leçons de magie à mémoriser, les câlins affectueux deviennent des corrections physiques si le gamin fait mine de se rebeller, oublie ses leçons ou ne fournit pas un rendement satisfaisant au goût de ses professeurs. L’enfant débordant de vie dont les rires avaient résonnés dans le château devient peu à peu un pâle spectre au visage sérieux qui n’ouvre la bouche que lorsqu’on lui ordonne et qui apprend au fil du temps à dissimuler hésitations, peurs et émotions derrière un masque de neutralité.
C’est pendant ce rigoureux apprentissage privé que Gellert apprend l’Occlumencie, science plus que difficile à maîtriser pour une aussi jeune personne et qui ne se fait pas sans douleur et larmes. Il ne comprendra que bien plus tard les raisons de ces sévères leçons; un grand mal, pour sa propre survie. C’est également à cette époque que les cauchemars débutent pour lui: visions angoissantes, prenantes, parfois dignes de l’apocalypse et qui le laissent particulièrement secoué. Il apprend que ces rêves qui semblent pour lui si réels sont en fait la manifestation d’un don latent de divination hérité de la famille autrichienne de sa mère, les Sárkány. Ilona ne possède pas ce pouvoir, elle refuse de toute manière d’apporter une quelconque aide à son fils et un tuteur est engagé pour encadrer Gellert et l’aider à apprivoiser ce don qui le dépasse et le terrorise également. Vers la fin de sa dixième année, il débute l’apprentissage de la Légilimencie, dont la pratique et la compréhension lui permettront, vers la fin de son adolescence, de modeler ses capacités d’Occlumens pour laisser voir aux autres de faux souvenirs et de fausses pensées.
Son entrée à Durmstrang ne se fait pas sans heurts, mais, le petit blondinet maigrichon aux yeux dépareillés et provenant d’une famille en déclin démontre rapidement qu’il est parfaitement capable de faire face aux autres étudiants de l’Institut. Ces rudes années d’apprentissage sous l’égide de tuteurs impitoyables lui confèrent une longueur d’avance sur les autres et ses capacités déjà exceptionnelles font en sorte que Gellert s’impose comme l’un des plus brillants élèves ayant fréquenté l’école. Sous l’enseignement particulier de Durmstrang, l’adolescent apprend la magie de combat, acquiert quelques capacités martiales notamment au bâton tant prisé par les sorciers de Durmstrang, ainsi qu’à exceller en duel. L’entraînement physique rigoureux auquel tous les étudiants sont soumis font en sorte que le délicat garçon grandit et s’épanouit, fréquenter d’autres jeunes gens de son âge lui est également bénéfique et Gellert jouit rapidement d’une certaine popularité mêlée de crainte vu comment il traite ceux qui ont le malheur de venir lui chercher des ennuis.
C’est aussi entre les murs froids de Durmstrang que Gellert est initié à la Magie Noire, une forme de sorcellerie qui capte rapidement son attention et son intérêt de par sa complexité et les possibilités qu’offre cet art. Bien vite, il se passionne pour ces cours qui sont prodigués, devançant les leçons, amenant des questions parfois dérangeantes à ses professeurs et finissant par comprendre que le niveau de maîtrise et de compréhension qu’il recherche devra s’apprendre de lui-même. Plusieurs nuits sont consacrées à l’élaboration d’expériences, à la construction de sortilèges, parfois accompagné d’autres étudiants désireux d’apprendre ou de se rapprocher de lui pour profiter un peu de sa gloire par ricochet.
Un changement significatif se produit par contre lorsque Gellert a treize ans. Obligé cette année-là de retourner au château Grindelwald pendant les vacances de Noël, c’est lors d’un dîner en présence de ses parents que sa perception entière de son petit monde jusqu’alors parfaitement en contrôle bascula. Conscient de ses capacités exceptionnelles, de sa force et devenu confiant à la limite de l’arrogance suite à toutes les louanges sans cesse reçues à Durmstrang, Gellert se fait plus que méprisant envers son père, qui lui rend évidemment chaque “courtoisie.” Peut-être qu’enfin déceler un fin sourire sur le visage de sa mère l’encourage à pousser l’audace. Les paroles se font acérées, et, Istvan étant le sorcier de faible envergure qu’il est, ce dernier se rabat sur sa violence habituelle pour faire taire l’impertinent héritier. Si un jeune adolescent ne fait pas le poids physiquement contre un homme d’âge mûr, Gellert connaît son avantage et les baguettes sont tirées. La querelle est violente, dévastatrice et même Ilona s’en mêle, démontrant aux deux hommes de la maison qui est -pour l’instant- la véritable puissance sous ce toit. Les égos sont froissés, l’orgueil profondément blessé et des paroles chargées d’une vérité dérangeante sont prononcées. Ils sont maintenant trois à connaître un bien lourd secret.
À son retour à Durmstrang l’entourage de Gellert le trouve changé, plus distant et réservé, chaque parole qui sort de sa bouche semble mûrement réfléchie, bien qu’il s’adonne encore par moments à certains traits d’humour. Il peaufine son apprentissage de la Légilimencie et en fait son arme silencieuse principale. Il semble vouloir se perdre dans ses études et recherches, feuillette un nombre incalculable de livres sur l’histoire de la magie, les anciennes légendes et s’intéresse de plus en plus à un vieux conte: Les Reliques de la Mort. L’histoire pour enfants devient factuelle à force de recherches, des concordances réelles se dessinent, laissant croire à la véracité de ce que tout le monde prend pour une jolie fable. Gellert voit en ces reliques un échappatoire à son existence, un moyen de changer le monde, de l’améliorer, de le libérer de lois qui ont brisé la vie de sa mère ainsi que la sienne. Obsédé à un niveau quasi malsain, il adopte le symbole des reliques comme sien, allant même jusqu’à le graver dans la pierre de Durmstrang, une marque permanente encore visible à ce jour.
Sa détermination couplée à un côté impitoyable appris dès son plus jeune âge ouvrent la porte à des expériences de magie noire toujours plus audacieuses, perverties certains oseront même dire. Les plans que Gellert dessine dans le secret de son coeur auront besoin d’une grande puissance pour être menés à bien et c’est par le biais des arts obscurs qu’il envisage en faire l’acquisition. Mais bien vite ses expériences deviennent trop dangereuses, même pour Durmstrang, et lorsque trois de ses camarades sont quasiment tués par l’une d’entre elles, la direction de l’Institut se voit contrainte de le renvoyer… non sans un certain soulagement inavoué.
Gellert reçoit rapidement l’avertissement de ne pas remettre les pieds sur le domaine des Grindelwald sous peine de mort, Istvan craignant les représailles des trois familles dont les rejetons resteront marqués à vie par cet événement. Des familles prônant la suprématie du sang et n’hésitant pas à maltraiter les Sang-mêlés, comme par hasard vous croyez? Une autre missive lui offre une porte de sortie vers l’Angleterre auprès de sa grand-tante Bathilda Tourdesac qui offre de l’héberger, offre qu’il ne peut refuser. Cette dernière l’accueille à bras ouverts, bien qu’il ne partage pas sa joie, ne se souvenant que trop vaguement d’elle. Bathilda est une historienne qui se concentre à la longue écriture d’un traité complet sur l’histoire de la magie, faisant en sorte que sa demeure foisonne de livres de tous horizons et qu’elle laisse Gellert, adulte depuis mai dernier, fouiner et aller à sa guise sans poser de questions. Sa seule insistance est de lui présenter un autre jeune homme du voisinage, demande à laquelle Gellert se plie tout d’abord de mauvaise foi, s’attendant à avoir affaire à un autre cancre, comme il semble tant en avoir dans ce petit village reculé de tout.
Dire qu’il s’était lourdement fourvoyé au sujet de ce fameux jeune homme serait un euphémisme. Sa grand-tante lui présente Albus Dumbledore, âgé de quelques années de plus que lui, auteur d’un article particulièrement brillant sur la transfiguration, une lecture que Gellert avait d’ailleurs dévorée dès sa parution. Le jeune homme est orphelin de père depuis longtemps et vient de perdre tout récemment sa mère dans des circonstances qu’Albus conserve d’abord vagues, le plaçant dans le rôle de chef de famille en charge de son frère cadet et de sa jeune soeur. Gellert est aussitôt attiré et fasciné, venant enfin de trouver un esprit aussi brillant que le sien, un désir semblable au sien de repousser les limites de ce monde imparfait, et une soif de grandeur rivalisant facilement avec la sienne. Les deux jeunes gens deviennent instantanément inséparables, échangent sur tous les sujets, passent toutes les heures de la journée ensemble et s’échangent une multitude de lettres jusqu’aux petites heures du matin, impatients de se retrouver pour poursuivre leurs débats enfiévrés. Gellert partage avec Albus ses recherches sur les Reliques de la Mort, ses ambitions de réformer le monde des sorciers ainsi que celui des Moldus, les idées deviennent des plans, des projets… et l’amitié qui unit les deux jeunes gens se transforme en sentiments plus forts, plus profonds, plus passionnés. Un Pacte de sang viendra sceller leurs destins.
Le reste de l’histoire n’est pas encore connue de Gellert, car le sortilège d’Ire Tempore est venu l’arracher à ces précieux instants de bonheur pour le projeter en 2021, une époque qu’il n’a jamais envisagée connaître. Décalé de sa réalité, il peine à retrouver ses repères. Il croise des sorciers issus d’époques différentes, entend des histoires en provenance de l’Europe de l’Est à son sujet; des récits d’une révolution, d’une trahison qu’il refuse de croire, d’une défaite tout aussi improbable. La prudence lui souffle de se réfugier à Poudlard, désignée comme l’un des rares remparts sûrs de cette époque perturbée. Terminer sa septième année et obtenir son diplôme étaient un objectif sur lequel sa grand-tante Bathilda insistait, ignorante de ses réels projets à l’époque. Le temps de prendre la pleine mesure de la situation, Gellert intégrera cette école, bien conscient que la protection ainsi obtenue entre ses murs peut également devenir sa prison.